mercredi 8 juillet 2009

Les Saintes Icônes

Tirés de la littérature "pastorale" récente, ces trois passages choisis montrent le rôle de l'icône dans la vie quotidienne du chrétien orthodoxe.

 

 

 

Les Saintes Icônes

Texte du Docteur Alexandre Kalomiros

 

Il perd beaucoup, celui qui n’a pas appris a regarder les saintes icônes’ Un chrétien dérive un grand profit de leur seule contemplation, alors que les peintures religieuses occidentales, pleines d’affectation et envahies par l’esprit du monde, peuvent provoquer beaucoup de mal. Une petite histoire empruntée au Paterikon peut expliquer ceci de façon très claire:

Trois pères avaient pour coutume de rendre visite au bienheureux Antoine chaque année. Deux d’entre eux interrogeaient le saint a propos de certaines pensées et du salut de leur âme. Le troisième restait silencieux, ne posant aucune question. Finalement, Abba Antoine lui demanda: ‘Voici de nombreuses années que tu viens ici, pourquoi ne me poses-tu jamais aucune question?’ Et lui de répondre: ‘Père, lorsque je vous regarde, je suis rassasié’ “.

Voyez-vous le grand bénéfice spirituel que peut procurer la simple contemplation des saints, et tout particulièrement lorsqu’il s’agit d’austères ascètes du désert comme Antoine le Grand? Le même bénéfice peut être obtenu en regardant les icônes. Bienheureux ceux qui possèdent de telles icônes dans leur maison et dans leur église paroissiale.

Les icônes ne sont pas des objets décoratifs mais des objets sacrés. Ce ne sont pas des peintures, des ornements muraux, mais des véhicules de la Grâce Divine, des échelles qui nous mènent vers les cieux, des représentations des réalités célestes. Elles représentent le Royaume des cieux, le Paradis, avec le Christ dans Sa gloire, entouré de Ses saints semblables à des corps célestes qui reçoivent leur lumière d’un autre astre, illuminés qu’ils sont par la puissance de Sa Divinité. Les icônes sont les images de la nouvelle création, du monde éternel et impérissable. Ils sont l’image de la déification de l’homme, accomplie par le don du corps adorable du Sauveur ressuscité à la droite de Dieu dans les cieux.

Derrière les humbles matériaux des icônes se trouve cachée la puissance de Dieu Qui sanctifie les eaux et Qui, à travers eux, a accompli des miracles. C’est cette puissance que nous adorons lorsque nous embrassons une icône de nos lèvres. Quand nous La vénérons, nous adorons le Dieu Un et Trine.

Ces objets sacre ne peuvent pas être confectionnés selon les caprices de nos goûts charnels. Nous ne pouvons non plus les placer à notre gré, comme des peintures dans une salle de séjour, parmi les objets profanes de ce monde.

Dans chaque foyer, un endroit particulier devrait être réservé aux objets sacrés: l'eau bénite, les couronnes du mariage, les livres saints. Une lampe à huile brûle toujours devant cet endroit (Exode 27: 20-21), cet endroit où s'élève aussi cet encens à la fois sensible et spirituel: notre prière.

 

 

 

Les icônes, portes ouvertes sur le ciel

Texte de la paroisse Saint Marc d’Ephèse à Roslindale (Massachusetts)

 

La Tradition rapporte qu’au sixième siècle vivait cloîtré au mont des Oliviers un moine particulièrement aguerri dans l’ascèse. Or il devait lutter férocement contre les tentations de la chair. Un jour, découragé par l’acharnement persistant de l’ennemi, ce moine s’adressa au démon de la fornication en ces termes: “Une fois pour toutes, laisse-moi tranquille! Voila tant d’années que tu mènes le combat contre moi!” C’est alors que le démon apparut devant les yeux de l’ascète pour lui répondre ceci: “Jure moi que tu ne révéleras a personne ce que je vais te dire et j’arrêterai de te tourmenter”. L’Abba ayant juré, le démon poursuivit: “Ne vénère pas cette icône, et je cesserai de te faire la guerre”. Il pointa alors le doigt vers une icône qui se trouvait dans la cellule de l’ascète: elle représentait la très sainte Mère de Dieu tenant dans ses bras l’Enfant Christ. “Laisse-moi y réfléchir répondit l’ermite. Le lendemain, il raconta tout a un certain Ancien qui avait été béni du don de discernement spirituel; cet Ancien menait le combat spirituel dans la Laure de Faran. “Tu es tombé dans un piège du démon, Abba, puisqu’il a réussi a te faire jurer un serment. Mais tu as bien fait de tout raconter. Il serait bien mieux pour toi de rentrer dans toutes les maisons de prostitution de la Palestine, plutôt que de cesser de rendre un culte au Seigneur et a Sa très sainte Mère.” (PG 87,2900)

L’exemple de cet ascète montre une fois de plus cette sage vérité: la morale n’a aucune valeur si elle n’est pas le fruit de la Foi. Il valait mieux pour cet Abba de commettre cent péchés en restant fidèle au Christ plutôt que rejoindre ceux qui Le renient. De nos jours, il se trouve de nombreux “chrétiens” — c’est du moins le nom qu’ils se donnent — qui font du christianisme une moralité. Et le Mauvais ne s’en prend pas a eux puisqu’ils rejettent la vénération des icônes. Ils vont même jusqu’à accuser les chrétiens orthodoxes d’adorer des idoles, des planches de bois!

Nous autres chrétiens orthodoxes, nous admettons facilement que nous sommes pécheurs. Oui, nous sommes conscients de nos péchés et même nous implorons Dieu de nous illuminer pour nous faire découvrir ceux que nous ne voyons pas en nous. Mais pour la Foi, nous la défendons, et de toutes nos forces, car notre salut est fondé sur elle. Aussi notre réponse aux iconoclastes d’aujourd’hui (iconoclaste: littéralement, le destructeur d’images), qu’elle s’adresse à des protestants, à des Témoins de Jehovah, ou à toute autre secte, reprend les mots mêmes du très saint Patriarche Germain II de Constantinople lorsqu’il s’adressait aux hérétiques de son époque (treizième siècle):

Un jour, l’un de ces Bogomils au visage de démon me demanda: ‘Pourquoi adorez-vous des murs, des planches de bois, du plâtre, des poudres colorées?’ En parlant ainsi, il voulait designer les saintes icônes. Voici ce que je lui répondis: ‘Quand avez-vous vu l’un des nôtres, un fils de notre Église, adorer le plâtre, les ruines, les piles de pierre et les peintures que l’ont peut rencontrer le long des routes? Car si nous adorions les pierres et les enduits colorés, alors notre devoir serait de les adorer toujours et partout, chaque fois que nous verrions une pierre ou un bout de planche peinte. Mais vous savez bien que ce n’est pas le cas, même vous, l’ennemi acharné de la vérité, n’oseriez le prétendre. Non, nous ne rendons pas un culte de vénération aux matériaux mais à la représentation peinte avec ces derniers. Et, d’ailleurs, cet honneur n’est pas rendu à toute représentation picturale mais seulement à l’image du Christ, de Sa très sainte Mère et des autres saints. Car l’honneur rendu a l’icône va à la personne dépeinte, au prototype.” (PG 140,664)

La colère des iconoclastes, ceux d’hier comme ceux d’aujourd’hui, n’est pas dirigée contre les représentations picturales, cependant. Ces mêmes personnes possèdent des peintures ou des photographies représentant des êtres chers, des occasions mémorables. Ils les conservent précieusement dans leur maison et il ne leur vient pas à l’idée de les considérer comme des idoles. Ceci est vrai aujourd’hui comme au huitième siècle, si ce n’est que la photographie n’était pas inventée a cet époque. Ces iconoclastes brûlaient et détruisaient les icônes des saints chaque fois qu’ils pouvaient en trouver une. Mais, nous précise la vie du saint martyr Etienne le Jeune, “ils n’hésitaient pas a laisser aux places d’honneur, bien en vue, des peintures d’arbres, d’oiseaux, d’animaux sans intelligence, voire la représentation d’imaginaires courses de char, ces spectacles sataniques, ou encore de chasses quand ce n’était pas acteurs au théatre ou cavaliers dans l’hippodrome”. (PG 100, 1113A)

C’est contre les saints que la rage des iconoclastes est dirigée, contre les saints dépeints sur les icônes, contre la grâce et la puissance que les fidèles retirent de leur vénération. Car même les mouchoirs, les vêtements des saints Apôtres étaient des véhicules de la grâce, des fontaines de miracles (Actes 19:12). Ou, comme le dit saint Grégoire le Dialogiste, “par les signes et les miracles brillent chaque jour les reliques des hommes saints (Evergetinos.1. vii, 8). Ou encore, selon les mots de saint Théodore le Studite. “il n'est pas jusqu'au sol où les martyrs ont été sacrifiés qui ne soit agent de la grâce” (PG 99, 768D). “Quand nous vénérons et adorons la croix, nous retirons d'abondantes bénédictions” (Saint Grégoire Palamas, Homélie XI. 62). Il en va de même pour les icônes. Sans être déifiées, elles sont utilisées par Dieu comme moyen d’adoration pour le salut et la sanctification de ceux qui s'approchent d’elles avec foi. “Car les saints ont été remplis de l'Esprit Saint dès cette vie et après qu’ils se soient endormis dans le Seigneur, la grâce du Saint Esprit continue d’habiter dans leurs âmes, comme aussi dans leurs corps ensevelis et dans leur représentation figurée, dans les saintes icônes. Non pas bien sûr dans l’essence mais par la grâce et la puissance” (Saint Jean de Damas, PG 94, 1249 CD).

Oui, vraiment, les icônes sont un élément central de nos vies. Sur les murs des églises, dans les dômes, dans les narthex, partout les humbles iconographes ont travaillé dans la prière et le jeûne et leurs âmes pleines de componction ont réussi à imprimer leur marque pleine de vie à toute la vie du peuple de Dieu. Les Saints habitent et vivent parmi nous. Des maintenant, l'Église Militante communie véritablement avec l’Église Triomphante.

Ici, nous voyons saint Pacôme recevoir l’habit monastique d’un ange. Là, nous assistons à la naissance au ciel de saint Ephraïm. Un tout petit peu plus loin se dressent les anchorites du désert. Continuons, voici 1’Abba Sisoes penché sur les quelques os, restes de celui qui fut jadis le glorieux empereur des grecs, Alexandre; nous pouvons lire sur l’inscription qu’il tient: “O mort, qui peut échapper a ton emprise?” Et là, ce sont les lamentations à la mise au tombeau du Christ, la résurrection de saint Lazare, le saint prophète Élie et la manne venue du Ciel, les saints militaires, les hiérarques, les bienheureux martyrs, la très sainte Mère de Dieu, la Passion du Seigneur, et nous pourrions continuer ainsi sans fin, à tourner les pages de ces livres ouverts offerts aux lettrés comme aux illettrés.

En fait, nous avons devant les yeux la béatitude future dépeinte par les mains mortelles de nos iconographes, eux qui n’ont rien en commun avec l’esprit du siècle, eux qui sont des étrangers qui habitent dans le monde sans être de ce monde, eux qui “humbles et contrits, jeûnent, pleurent sur leurs péchés et, scion les mots du psalmiste, vont tout le jour la face tournée vers la terre (Ps. 37:6), tout illuminés de l’immense joie qu’apporte la puissance de la foi” (Photios Kontoglou).

L’art est ainsi assimilé et sanctifié par et dans l’Église. L’icône, l’hymnographie, les panneaux de bois sculpté, les vêtements liturgiques, la psalmodie, la décoration, les vases sacrés, toute l’architecture du temple, les manuscrits, les collections de vies des saints, les textes liturgiques, tous ces éléments ne font qu’un avec notre Foi et ses dogmes saints. Ils sont l’image, la figure des choses célestes. Ils reforment l’arche spirituel où notre salut est accompli. Ils sont un mode de vie quotidien, “de la veille du matin jusqu’à la nuit” (Ps.129:5). Ils sont la sanctification et la tradition vivante. Non pas des abstractions intellectuelles fumeuses, un savoir scolastique, mais tout au contraire un salut tangible, une doxologie (glorification) des matériaux de cette terre, de cette poussière dont sont faits nos corps qui, eux-mêmes, seront glorifiés ou damnés pour l’éternité.

Que deviennent muettes les lèvres de ceux qui ne vénèrent pas les saintes icônes! Ou plutôt, que les yeux de leurs âmes s’ouvrent pour qu’ils puissent contempler les merveilles que Dieu accomplit au moyen des icônes, et toute la puissance que les fidèles obtiennent, non seulement en les vénérant, mais par un simple regard posé sur la face des saints. Car “apercevoir les saintes icônes, c’est déjà être rempli de toutes les bénédictions”, comme l’écrivait il y a seize cents ans saint Jean Chrysostome. Alors les iconoclastes comprendront leur erreur lorsqu’ils confondent les icônes avec des idoles. Ils réaliseront alors la véritable valeur du sacrifice des myriades de confesseurs et martyrs qui ont souffert pour ces “morceaux de bois”.

Les icônes sont une porte ouverte sur le ciel. Quiconque garde les portes et les fenêtres fermées, demeure dans l’obscurité. Car “l’icône est une porte qui ouvre l’esprit obéissant à Dieu, à l’image intérieure et à la ressemblance du prototype (c’est à dire Dieu)” (PG 100, 11 13A).

Que le Seigneur, Sa très sainte Mère et tous les saints ouvrent les portes du Royaume des cieux à tous ceux qui vénèrent les précieuses icônes.

Amen.

 

 

 

Un soutien dans le combat spirituel,

les icônes

Texte du Père Georges Turpa

 

Après avoir discuté de la théorie et de l’enseignement orthodoxes sur les saintes icônes, le temps est venu de parler de la vénération pratique des icônes dans la vie quotidienne d’un véritable chrétien orthodoxe.

À l’église, nous savons tous comment il faut vénérer les icônes: nous allumons des cierges devant elles, nous nous signons avec le signe de la Croix, et nous les embrassons. Nous embrassons notre Sauveur sur la main droite; pour l'icône de la Mère de Dieu, nous commençons par l’enfant Christ, baisant Sa main ou Son pied avant d’embrasser la main de Sa très sainte Mère. Pour les saints hiérarques nous avons le choix entre la main droite qui bénit et l'évangile qu’ils tiennent de la main gauche. Pour les martyrs, nous posons les lèvres sur la croix qu’ils brandissent dans leur main. Et ainsi de suite pour les types d’icônes.

Mais qu'en est-il à la maison? Où placer les icônes? C’est un problème auquel nous autres, prêtres de Toronto, nous sommes souvent confrontés. Certaines personnes refusent d’avoir des icônes dans telle ou telle pièce. D'autres s'opposent à ce que telle ou telle icône rentre chez eux parce que, disent ils, “cela n’irait pas”. Selon ce que permettent les conditions d'habitation et en accord avec les traditions nationales, chaque famille orthodoxe devrait installer un “coin des icônes” ou une mini-chapelle. L'icône de notre Sauveur devrait prendre place sur la droite, celle de la Mère de Dieu avec l’enfant divin sur Sa droite: les autres icônes, peuvent être disposées selon les décisions de la famille. Mais il devrait toujours se trouver dans l'arrangement choisi, un certain ordre qui ressemble à celui qui règne à l'Église, car il ne peut y avoir de désordre dans le Royaume de Dieu. Une lampe à l'huile devrait briller vingt quatre heures par jour devant ces icônes. Pendant les prières familiales de la journée, de l’encens devrait aussi être brûlé devant elles. Une tradition locale grecque fait également brûler l'encens au lever et au coucher du soleil.

Certains pourront demander: pourquoi allumer des lampes, pourquoi offrir de l’encens devant les icônes? Saint Germain, Patriarche de Constantinople enseigne:

Que personne ne se scandalise si nous apportons devant les icônes des saints des lampes et de l’encens odorant. Tout cela est fait symboliquement en leur honneur, eux qui ont leur repos dans le Christ; et cet honneur remonte jusqu’au Christ, car comme le dit le sage Basile ‘l’honneur rendu aux bons serviteurs par leurs compagnons est une preuve de bonne volonté envers le Maître commun’. Nos lumières tangibles sont un symbole du don immatériel et divin de la lumière, tandis que l’encensement aux suaves odeurs est un symbole de l’accomplissement très pur et absolument total qu’accorde le Saint Esprit”. (Épître Dogmatique)

D’autres Pères nous enseignent aussi que l’huile représente la miséricorde de Dieu et la flamme la lumière de nos âmes, qui flottent sur cette miséricorde, soutenues par elle. Quand à l’encens, voici l’enseignement du hiéromartyr saint Cosme d’Etolie sur les encensoirs: “L’encensoir représente notre Souveraine la très sainte Mère de Dieu. Les charbons ardents brûlent à l’intérieur de l’encensoir mais ne le consument pas; de même, notre Souveraine la très sainte Mère de Dieu a reçu le Christ mais Il ne l’a pas consumée. Bien plutôt, elle a été illuminée par Lui. L’encens signifie l’Esprit très Saint. Le couvercle de l’encensoir est un signe de la protection de l’Esprit Saint. Les trois chaînes symbolisent la Sainte Trinité. Quant aux petites clochettes, elles représentent l’enseignement des saints Apôtres.”

Des icônes peuvent être conservées ailleurs dans la maison. Mais jamais comme une décoration, choisie parce que sa couleur s’accorde avec la tapisserie ou avec la moquette. Non, elles sont là pour nous rappeler que nous sommes des chrétiens orthodoxes et que nos actes doivent être en conséquence. J’ai connu un orthodoxe qui avait l’habitude de regarder chez lui des livres orduriers, assis sur son sofa. Un jour il réalisa que l’icône de la Mère de Dieu se trouvait sur le mur en arrière de lui. Aussitôt il passa dans une autre pièce. Mais, comme il s’asseyait de nouveau, il réalisa qu’échapper à la présence de l’icône ne le soustrayait pas au regard de Dieu: il jeta alors ses livres et jamais plus n’en toucha de semblables. Non seulement cette icône lui servit de rappel de sa foi, mais sans aucun doute, la grâce jaillit de l’icône pour illuminer son âme sur ce point.

La salle à manger serait un bon endroit pour placer une icône de la Cène Mystique de notre Seigneur. Saint Euphrosynos le cuisinier conviendrait bien pour la cuisine, ou saint Spyridon et saint Nicodème, les fabriquants de prosphore du Monastère des Grottes de Kiev. Même dans la voiture, une icône médaillon de notre Sauveur ou de la très sainte Mère peut trouver place, ou peut-être celle de notre patron ou de saint Nicolas.

Les chrétiens orthodoxes doivent a tout prix préserver leurs enfants autant que faire se peut — et se préserver eux-mêmes — du mal qui émane des anti-icônes: par exemple, des images religieuses hétérodoxes, des magazines pornographiques, des programmes de télévision qui respirent la violence et les passions. Les parents devraient s’assurer que leurs enfants ne conservent pas dans leur chambre des affiches représentant des “idoles” décadentes du cinéma ou de la musique rock. Il m’est arriver d’être appelé dans des foyers pour accomplir le service de l’eau bénite, uniquement parce que les enfants de la maison étaient victimes de rêves maléfiques et de passions impures. Dans chaque cas, ces enfants avaient décoré les murs de leur chambre, non avec de saintes icônes, mais avec ces anti-icônes vouées au démoniaque, à l’obscène, au lascif. Si un chrétien orthodoxe porte toujours ses regards sur les saintes icônes, il contemplera leurs prototypes face à face dans le Royaume des Cieux; d’un autre côté, si ses yeux sont saturés des visions de ces anti-icônes, il en verra les prototypes dans le royaume du Mauvais; alors avec eux, il pleurera et grincera des dents dans une chute sans fin l’éloignant toujours plus de Dieu, de la Lumière, de la Vie.

Comme l’écrit le docteur Cavarnos, “quiconque a la chance d’avoir les veux ouvert,. quiconque peut percevoir quelque chose de la profondeur mystique contenue dans notre art religieux, celui-là devient un homme avec des yeux neufs, une âme neuve, pour toujours altérée de cette eau vivante qui nous emporte vers la vie éternelle; le voici qui ne veut plus tourner son regard vers ce qu’il considérait ses raisons de vivre, le voici tout étonné à la pensée de son ancien aveuglement”. À l’inverse, tous ceux qui ne peuvent accepter cet enseignement, “tous ceux qui se sentent gênés, exaspérés par les icônes pendant leurs prières, sont en réalité exaspérés par le Dieu Incarné: c’est comme s’ils disaient que le Christ avait mal agi en prenant forme et nature humaines”, ainsi que le fait remarquer avec beaucoup de pénétration le docteur Kalomiros. Les voici devenus iconoclastes, adorateurs des anti-icônes.

Pour terminer, il faut bien réaliser que les icônes ne nous aideront pas par elles-mêmes à trouver le salut. Nous avons besoin de toutes les armes de notre Foi: les jeûnes, la prière, l’aumône, le repentir, la Sainte Communion, tous les autres Mystères chrétiens, toutes les autres vertus chrétiennes. Ainsi nous pourrons devenir nous-mêmes des icônes des saints, qui sont eux-mêmes des icônes du Christ, Qui est la seule icône parfaite du Père. Pour conclure, écoutons l’exhortation de saint Jean de Damas pour, chacun selon nos capacités, la mettre en pratique:

Que les fidèles de notre foi rendent un culte (de dulie) aux saints, car, à travers eux, c’est à Dieu lui-même que l’on rend le culte par excellence (de latrie). Élevons leur des monuments, vénérons leurs icônes et devenons nous mêmes, par l’imitation de leurs vertus, des monuments vivants, des icônes vivantes de leur gloire. Rendons honneur à Celle qui porta Dieu comme étant véritablement et tout spécialement la Mère de Dieu. Honorons aussi comme apôtre et martyr le prophète Jean, baptiste et précurseur, honorons les Apôtres comme les frères du Seigneur, eux qui Le virent face a face et L’accompagnèrent jusqu’à Sa Passion. Honorons encore les martyrs du Seigneur, ces soldats du Christ de toutes origines, qui ont bu Sa coupe, qui ont été baptisés du baptême de Sa mort source de vie pour participer à Sa passion et à Sa gloire; et, parmi eux, le protomartyr Étienne, premier diacre du Christ et apôtre. Rendons honneur aux Pères saints, les ascètes théophores dont la lutte fut le combat spirituel de la conscience le plus long, le plus laborieux. Rendons honneur à ceux qui furent prophètes avant la Grâce, les patriarches et les justes qui prédirent la venue du Seigneur. Étudions avec le plus grand soin la vie de ces hommes, devenons les émules de leur amour et de leur foi, de leur espérance et de leur zèle, de leur vie et de leur endurance dans la souffrance, de leur patience jusqu’au sacrifice de leur sang pour que, nous aussi, nous partagions avec eux leurs couronnes de gloire. Amen”

 

 

 

L'OBSERVATEUR ORTHODOXE VOL1. NO. 3 FÉVRIER 1984 - L'icône dans l'Orthodoxie: réalité d'aujourd'hui. Dossier établi, traduit et présenté par la mission orthodoxe francophone de l'Église russe hors frontières.

 


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