mercredi 8 juillet 2009

Le concile de 1983

LE CONCILE DE 1983

 

 

 

 

Le Concile de 1983 fut tout à fait particulier. Sa particularité résidait entièrement dans sa modestie et dans le fait qu’il a passé inaperçu. Sans doute, pour la première fois dans toute l’histoire de l’Église, un concile se tenait dans un ermitage — l’ermitage de la Sainte Transfiguration — pas même un monastère. De tous les évêques membres de notre concile, quatorze s’étaient réunis de tous les coins du monde libre sous la présidence du premier hiérarque de notre Église, le métropolite Philarète; dix d’entre eux étaient des anciens âgés en moyenne de soixante-treize ans. En outre, aucun concile n’a été aussi court: il a duré moins de deux semaines en tout. L’ermitage où se sont tenues toutes les sessions est certes très bien situé, loin de toute circulation et entouré d’une belle forêt de pins et de feuillus. Mais il faut quand même avouer que l’endroit n’a rien de remarquable. À trois milles de l’ermitage se trouve le village propret de Mansonville établi au croisement de deux routes rurales. Ses environs abritent un millier de personnes et cinq petites églises de différentes religions. L’église de notre ermitage, oeuvre de l’architecte russe G. Glinine qui s’est endormi en cette année conciliaire, rappelle une tente de bois et se marie parfaitement au faîte des pins qui l’enserrent de toutes parts.

 

La presse locale et mondiale n’a évidemment pas consacré une ligne à notre concile si peu frappant, accentuant par là sa modestie. On n’a absolument rien dit de nous tandis qu’à l’autre bout du Canada, dans la ville de Vancouver distante de plus de 3,500 kilomètres, se tenait l’assemblée oecuménique mondiale. À cette assemblée se retrouvaient des représentants de toutes les religions de la planète : orthodoxes, catholiques, protestants de toutes les sectes, juifs, musulmans, bouddhistes, hindous et même de purs chamanes-guérisseurs ou en termes clairs sorciers. Si l’on ajoute à cette féérie de couleurs le clergé féminin et les danseuses aux pied nus à la Isidora Duncan venues faire leur apparition entre les sessions, on n’arrivera sans doute pas a trouver de terme propre à définir le caractère de cette grande assemblée mondiale.

 

Il y a près d’un siècle que l’oecuménisme monte à l’assaut de la vraie Église une du Christ, investie par le Christ de l’autorité de lier et de délier. Ce mouvement réunit toutes les innombrables hérésies, petites et grandes, reconnaissant en cites comme des étincelles de vérité à partir desquels il faut créer la future Église oecuménique — qui est en train de se faire — pour remplacer l’Église historique du Christ que ce mouvement considère comme un échec. Contre une doctrine aussi monstrueuse, les Orthodoxes ont rédigé des masses de textes dénonçant l’oecuménisme comme l’hérésie des hérésies: nous ne pouvons les citer en détail dans un aussi court article. Selon toute probabilité cependant, le temps de la polémique est passé et le moment est venu où il faut condamner. Aussi peu marquant qu’ait pu sembler notre Concile tic 1983, il a enfin condamné l’oecuménisme, l’anathématisant en ces termes:

 

 

 

« À ceux qui attaquent l’Église du Christ en enseignant qu’elle se trouve divisée en prétendues ‘branches’ différant par la doctrine et la manière de vie, ou que l’Église n’a pas d’existence visible, devant se former dans l’avenir par l’union en un seul corps de toutes les ‘branches’, sectes, confessions, voire religions; à ceux qui ne distinguent pas entre le sacerdoce et les mystères de l’Église et ceux des hérétiques, disant au contraire que le baptême et l’eucharistie des hérétiques sont efficaces pour le salut ; à ceux qui en toute connaissance de cause entrent en communion avec les hérétiques susdit, ou qui se font les avocats, les disséminateurs ou les défenseurs de leur nouvelle hérésie de l’oecuménisme sous prétexte de l’amour fraternel ou de l’unification supposée des chrétiens séparés.

 

Anathème, Anathème, Anathème! »

 

 

 

L’Église orthodoxe russe à l’étranger, présidée actuellement par le métropolite Philarète, constitue une partie inséparable de l’Église russe historique. À titre d’Église locale,  elle a le droit de réunir périodiquement ses propres conciles et de prendre des décisions qui lient totalement ses enfants dispersés de par le monde. Le temps dira si les autres Églises locales accepteront notre décision sur l’œcuménisme, comme les décrets des dix conciles locaux ont été en leur temps acceptés par tous et inscrits au « livre des canons des saints Apôtres, des saints Conciles oecuméniques et locaux et des saints pères » de l’Église oecuménique. Nous savons bien que les autres Églises locales n’ont pris acte qu’en passant de tous nos décrets conciliaires contre le patriarcat soviétique de Moscou —dont la hiérarchie s’est totalement soumise au parti communiste athée— et qu’il leur en a valu un grand tort spirituel. En justifiant leur attitude, les Église orthodoxes locales ont fait erreur en affirmant qu’il leur était difficile d’analyser tous les aspects des affaires internes de la Russie et que toutes nos ordonnances contre le patriarcat soviétique de Moscou étaient politiques plutôt qu’ecclésiastiques, alors qu’il est désormais évident pour toute personne raisonnable que le matérialisme et l’athéisme constituent le dogme à la base du communisme. En ce qui à trait l’oecuménisme, chaque Église locale a eu le temps de l‘Étudier depuis un siècle et, si une Église locale quelconque fonde son enseignement et sa vie sur les canons des saints Apôtres et de tous les concile orthodoxes, elle ne peut que reconnaître le fait que l’oecuménisme a rassemblé en une seule toutes les hérésie passées et présentes et qu’il appelle cette unité église. Une telle manifestation relève déjà de l’Antéchrist.

 

En promulguant l’anathème, nous avons donc voulu protéger notre troupeau de cette tentation apocalyptique et nous avons par là, sans le vouloir, posé à la conscience de toutes les Églises locales une question sérieuse à laquelle elles devront tôt ou tard répondre dans un sens ou dans l’autre. Leur avenir spirituel dans l’Église orthodoxe universelle dépendra de cette réponse. En droit, l’anathème que nous avons lancé a une portée strictement locale limitée à l’Église orthodoxe russe à l’étranger, mais en fait,  il a une immense signification historique pour l’Église universelle précisément parce que l’oecuménisme est une hérésie mondiale. La position prise part l’Église orthodoxe russe à l’Étranger interpelle la conscience de tous les Orthodoxes. II s’agit d’une grande croix que le Seigneur fait porter. Nous ne pouvions plus garder silence cependant, continuer à se taire aurait signifié trahir la vérité: que le Seigneur nous délivre tous d’une telle trahison.

 

 

Vitaly, archevêque de Montréal

 

L’OBSERVATEUR ORTHODOXE

ISSN 0824- 653X

MARS 1985

No 7


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